Cinq domaines de pratiques organisationnelles à l’appui de l’équité raciale dans le secteur de la santé mentale des enfants et des adolescents
Ce que vous devez savoir
En Ontario, on observe un manque flagrant de stratégies, de lignes directrices ou de cadres cohérents concernant des pratiques organisationnelles visant à faire progresser l’équité raciale au profit des clients, des membres de leur famille et du personnel. Les auteures du commentaire mettent en lumière cinq domaines de pratiques organisationnelles favorisant la prestation de services équitables, soit les suivants : Leadership et engagement organisationnels, Partenariats interorganisationnels et multisectoriels, Diversité et perfectionnement de l’effectif, Besoins et mobilisation des clients et de la collectivité et Amélioration continue.
En bref
La pandémie de COVID-19 a eu des répercussions disproportionnées sur la santé mentale des personnes d’âge adulte racialisées. Plusieurs facteurs y ont concouru, dont mauvaises conditions de logement, travail précaire et racisme. Au Canada, les jeunes racialisés sont également confrontés à beaucoup plus d’obstacles en matière de soins que les jeunes blancs. En effet, comme ils ont davantage tendance à se méfier du système de santé, ils sous-utilisent les services médicaux et présentent donc un moins bon état de santé. À la lumière des récents événements survenus au Canada et dans le monde entier, de nombreux organismes se sont mis à réfléchir au rôle qu’ils jouent dans la perpétuation du racisme et à la façon dont ils peuvent contribuer à mettre fin aux inégalités raciales. Toutefois, il n’existe pas dans le secteur de la santé mentale des enfants et des adolescents de l’Ontario de stratégies, de cadres ou de lignes directrices cohérents en matière de pratiques organisationnelles pour faire progresser l’équité raciale et aider le personnel à fournir des services équitables.
Méthodes
Le Centre d’excellence de l’Ontario en santé mentale des enfants et des adolescents et Santé mentale pour enfants Ontario (CMHO) ont entrepris de faire progresser l’équité raciale dans le secteur ontarien de la santé mentale des enfants et des adolescents. Ils ont commencé par une étude exploratoire de la documentation et une analyse des pratiques organisationnelles qui encouragent l’équité raciale dans les organismes de santé mentale pour enfants et jeunes de la province. Deux approches, la science de l’application et l’amélioration de la qualité, ont été utilisées auprès des dirigeants, prestataires de services, jeunes et membres de leur famille racialisés.
Conclusions
La littérature sur les approches en matière d’équité raciale comprend cinq domaines de pratiques organisationnelles :
- Leadership et engagement organisationnels. Pour faire progresser l’équité raciale, un leadership fort et un engagement public à l’égard de la lutte contre le racisme sont essentiels. Il faut que les organismes harmonisent leur vision, leurs politiques et leurs ressources. Une équipe de direction qui fait des commentaires constructifs sur l’équité raciale, manifeste son intérêt pour cette dernière et suit une formation sur ce sujet est le vecteur de changements dans l’organisme.
- Partenariats interorganisationnels et multisectoriels. Afin de faire progresser l’équité raciale, il faut échanger des connaissances et des ressources avec d’autres organismes communautaires pour améliorer les activités de sensibilisation, l’accès aux services des communautés racialisées et la coordination des soins dans l’ensemble des secteurs. De concert, les organismes peuvent aussi appuyer des changements systémiques qui portent sur les déterminants sociaux de la santé. Ainsi, à la suite de collaborations intersectorielles avec le milieu de l’éducation et de partenariats communautaires avec des organismes religieux, on a constaté une amélioration de la santé mentale de jeunes et d’autres résultats d’ordre plus général dans les communautés racialisées grâce à la lutte contre la stigmatisation, au dépistage précoce des besoins en matière de santé mentale et à un meilleur accès aux services de santé mentale.
- Diversité et perfectionnement de l’effectif. La mobilisation de personnels racialisés, le recrutement accru de travailleurs diversifiés et la formation du personnel aux principes de la sensibilité culturelle, de l’antiracisme et de l’équité raciale en vue de réduire les préjugés implicites débouchent sur une situation équitable. Un personnel qui est représentatif des communautés racialisées dans lesquelles il exerce ses activités possède les connaissances et l’expérience nécessaires pour comprendre leurs besoins et y répondre. Il est également en mesure de surmonter la méfiance découlant du racisme systémique ainsi que d’expériences et de résultats négatifs.
- Besoins et mobilisation des clients et de la collectivité. Une intervention de qualité auprès des communautés, des jeunes et des membres de leur famille racialisés et un partenariat d’égal à égal avec eux s’imposent pour tenir compte de leurs voix et élaborer de concert avec eux des services ainsi que des initiatives au niveau de l’organisme et du système. Des soins de santé mentale antiracistes doivent également reposer sur des évaluations et des services qui soient culturellement et linguistiquement adaptés. D’importants travaux sont déjà en cours pour mettre en place des soins adaptés à la culture, dont des cadres pour fournir aux communautés autochtones des services axés sur la culture et les points forts.
- Amélioration continue. Il s’agit notamment d’élaborer des cadres dans une optique d’équité, de promouvoir la responsabilité grâce à des procédures d’évaluation et de cerner les domaines nécessitant des améliorations. Il faut en outre inciter les communautés concernées à formuler des commentaires et interpréter les données recueillies afin de s’assurer, malgré les efforts déployés, de ne pas perpétuer les inégalités et de s’appuyer sur ces précieux renseignements pour planifier des améliorations. Pour atteindre l’égalité raciale, les données démographiques confidentielles fondées sur la race du personnel et des clients peuvent donner aux organismes de plus amples renseignements sur leurs propres besoins et points forts ainsi que sur les communautés qu’ils servent.
Applications possibles
La formation du personnel à l’antiracisme et la collecte de données fondées sur la race constituent un premier pas vers la promotion de l’équité raciale, en plus de surmonter les obstacles au financement et au renforcement de la capacité organisationnelle. Les chercheurs, les décideurs et les prestataires de services de santé mentale pour les enfants et les adolescents doivent travailler en commun. Ils doivent chercher à faire des progrès significatifs et soutenus afin que les enfants et les adolescents issus de milieux culturels, ethniques et linguistiques divers reçoivent les meilleurs soins possibles.
Recherches futures
Il faut faire davantage de recherches pour bien comprendre le rôle du conseil d’administration, en isolant et en évaluant les résultats qu’a donnés la formation axée sur l'équité raciale au niveau des comportements et de l’organisation, et en définissant des stratégies efficaces pour fidéliser le personnel racialisé et s’instruire à ses côtés.
Auteur.e.s
Gabrielle Lucente, Julia Kurzawa et Evangeline Danseco, Centre d’excellence de l’Ontario en santé mentale des enfants et des adolescents, Centre hospitalier pour enfants de l’est de l’Ontario, Ottawa, Ontario, Canada