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Instantané de recherche : Répercussions de la pandémie de COVID-19 sur la santé mentale des aînés : étude portant sur l’isolement social et la solitude

En bref

La pandémie de COVID-19 a été préjudiciable à la santé mentale des Canadien·ne·s. L’équipe de recherche s’est intéressée aux expériences sociales et à la santé mentale positive des personnes âgées pendant la pandémie. Plus du quart des aînés vivaient seuls et plus du tiers ont déclaré éprouver un sentiment de solitude en raison de la pandémie. L’équipe de recherche a constaté que le fait de vivre seul et le sentiment de solitude étaient associés à une moins bonne santé mentale (c.-à-d. : satisfaction moindre à l’égard de la vie, plus faible probabilité de se sentir en bonne santé mentale et d’avoir un fort sentiment d’appartenance à la communauté). Toutefois, des taux plus bas d’indicateurs de santé mentale positive étaient davantage associés à la solitude qu’au fait de vivre seul. Ceci est valable quels que soient le genre, le groupe d’âge et le niveau de scolarité des répondants. Parmi les répondant·e·s vivant seuls, les hommes et les personnes âgées de 65 à 74 ans semblaient plus susceptibles d’éprouver des problèmes de santé mentale. Ces résultats soulignent l’importance d'identifier les personnes âgées qui souffrent de solitude pendant et après une pandémie et d’améliorer les soins de santé publics.

Objet de la recherche

L’isolement social et la solitude ont été associés à des problèmes de santé mentale chez les personnes âgées. Cependant, on ne sait que peu de choses à propos du lien entre un sentiment de solitude et l’isolement, d’une part, et une santé mentale positive, d’autre part, chez les personnes âgées pendant la pandémie de COVID-19. Les termes « isolement social » et « solitude » sont souvent utilisés indifféremment, en raison de leur lien apparent et de leurs effets similaires sur la santé. Toutefois, il est important de les distinguer : si l’isolement social se caractérise par un manque de contacts sociaux, la solitude, elle, correspond à un sentiment d’insatisfaction sur le plan social. Ainsi, on peut vivre seuls, avoir des contacts sociaux limités et ne pas se sentir isolés et, à l’inverse, on peut être très entourés et se sentir seuls. L’équipe de recherche a réalisé une étude visant à évaluer les indicateurs de bonne santé mentale, d’isolement social et de solitude chez les personnes âgées pendant la pandémie de COVID-19. Elle a également étudié si l’isolement social et la solitude étaient indépendamment liés à des signes de bonne santé mentale.

Méthodes

L’équipe de recherche a examiné les réponses de 5 332 personnes âgées au questionnaire électronique et celles recueillies lors des entrevues téléphoniques au cours de deux périodes (2020 et 2021). Une bonne santé mentale autoévaluée, un fort sentiment d’appartenance à la communauté locale et une satisfaction à l’égard de la vie lui ont servi d’indicateurs pour mesurer la santé mentale positive. Elle a ensuite analysé les données sur le lien entre l’isolement social, la solitude et la santé mentale positive en tenant compte de certaines caractéristiques sociodémographiques (comme le genre, le groupe d’âge, le niveau de scolarité, le lieu de résidence, le statut d’immigrant et l’appartenance à un groupe racisé) susceptibles d’avoir une incidence sur les expériences de différentes personnes âgées.

Conclusions de la recherche

Certaines caractéristiques sociodémographiques, comme le genre, le groupe d’âge et le niveau de scolarité, contribuent à l’isolement social et à la solitude. Ainsi, les femmes, les personnes de 65 à 74 ans et les personnes ayant fait des études de niveau secondaire ou moins sont moins susceptibles d’avoir une bonne santé mentale autoévaluée. Les femmes et les personnes de 65 à 74 ans sont moins susceptibles de déclarer avoir un fort sentiment d’appartenance à leur communauté locale. Le degré de satisfaction à l’égard de la vie des femmes et des personnes ayant fait des études de niveau postsecondaire est aussi plus faible.

Les résultats révèlent que, dans l’ensemble, les personnes âgées qui connaissent l’isolement social ou la solitude sont moins susceptibles de déclarer avoir une santé mentale positive que celles qui n’en font pas l’expérience. Toutefois, le sentiment de solitude va plus souvent de pair avec un moins bon bien‑être mental que l’isolement social.

Ces résultats soulignent l’importance de considérer ces facteurs comme des expériences distinctes lors de l’élaboration de stratégies visant à promouvoir et à protéger une santé mentale positive au sein de la population âgée pendant les périodes de crise, comme la pandémie de COVID-19.

Portée et limites des conclusions

Les auteur·trice·s soulignent que, comme ces résultats reposent sur des données transversales, il est impossible de tirer des conclusions de type causal. Ainsi, la solitude peut entraîner une dégradation de la santé mentale, et, inversement, une santé mentale précaire peut provoquer un sentiment de solitude. Les données n’ont pas non plus permis à l’équipe de recherche d’évaluer le niveau de santé mentale ressenti, la satisfaction à l’égard de la vie et le sentiment d’appartenance à la communauté locale avant et après la pandémie. En outre, la corrélation entre la solitude et une santé mentale positive ne prend pas en compte tous les autres facteurs possibles, comme les conditions de vie ou les ressources à la disposition des personnes âgées.

Applications possibles

Les résultats de cette étude peuvent servir à orienter les politiques de santé publique relatives au bien‑être des personnes âgées, comme suit par exemple :

  1. Programmes d’aide sociale : les planificateurs de programmes pourraient songer à mettre en place des programmes ciblés pour atténuer l’isolement et la solitude des personnes âgées et favoriser leur bien-être mental pendant une pandémie et par la suite.
  2. Sensibilisation à la solitude : les professionnels de la santé et les prestataires de services pourraient s’appuyer sur ces résultats pour mieux comprendre les effets de la solitude sur les personnes âgées et prendre des mesures appropriées pour maintenir ou améliorer leur santé mentale.
  3. Politiques publiques : les décideurs politiques pourraient utiliser ces résultats pour élaborer des politiques et des programmes visant à soutenir les personnes âgées, en mettant l’accent sur la prévention de la solitude et la promotion de la santé mentale au sein des différents groupes sociodémographiques.
  4. Interventions ciblées : les professionnels de la santé et les travailleurs sociaux pourraient utiliser ces résultats pour concevoir des interventions adaptées aux besoins particuliers des personnes âgées, en tenant compte du contexte sociodémographique et des problèmes de santé mentale.

Auteur·trice·s

Laura L. Ooi, Ph. D. (1) ; Li Liu, Ph. D. (1) ; Karen C. Roberts, M. Sc. (1) ; Geneviève Gariépy, Ph. D. (2,3,4) ; Colin A. Capaldi, Ph. D. (1)

  1. Agence de la santé publique du Canada, Ottawa (Ontario), Canada
  2. Agence de la santé publique du Canada, Montréal (Québec), Canada
  3. Département de médecine sociale et préventive, École de santé publique, Université de Montréal, Montréal (Québec), Canada
  4. Centre de recherche de l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal, Montréal (Québec), Canada

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