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Instantané de recherche : Selon une étude, la formation et la préparation des diplômés en médecine familiale pour traiter un trouble lié à l’usage d’opioïdes semblent limitées

Ce qu’il faut savoir

Au Canada, les médecins de famille représentent souvent le premier point d’accès à des soins pour les personnes présentant un trouble lié à l’usage d’opioïdes (TUO). Celles auxquelles leur médecin de famille prescrit un traitement obtiennent souvent de meilleurs résultats thérapeutiques. L’équipe de recherche a passé en revue le programme d’études des médecins résidents en médecine familiale sur le traitement d’un TUO dans les établissements d’enseignement de l’Université de Toronto. Elle a également interrogé huit nouveaux diplômés en médecine familiale de l’Université de Toronto pour savoir jusqu’à quel point ils se sentaient à l’aise de traiter un TUO. Sur les 11 établissements d’enseignement de l’Université de Toronto qui ont répondu, trois comptaient des stages cliniques obligatoires sur la prise en charge des dépendances, huit n’offraient pas de tels stages et quatre n’ont pas fourni de précisions à ce sujet. Quatre établissements ont déclaré ne pas offrir de formation sur les dépendances. Les sept établissements offrant une formation dans ce domaine ont indiqué que l’enseignement formel durait d’une à cinq heures par an. Parmi les personnes interrogées, trois avaient reçu une formation complémentaire à la fin de leur résidence en médecine familiale, une avait suivi une formation en médecine d’urgence, une autre en prise en charge des dépendances et la troisième n’en a pas révélé le domaine. L’analyse thématique des entretiens avec les nouveaux diplômés a mis en évidence deux thèmes principaux : la marginalisation structurelle des personnes présentant un TUO et l’invisibilité du TUO dans la médecine de famille.

Objet de la recherche

Les médecins de famille représentent souvent le premier point d’accès à des soins pour les personnes présentant un trouble lié à l’usage d’opioïdes (TUO). Celles auxquelles leur médecin de famille a prescrit un traitement par agonistes opioïdes (TAO) tendent davantage à continuer celui-ci, à se détourner des opioïdes non réglementés et à avoir un niveau de satisfaction élevé à l’égard du traitement. Les médecins de famille en début de carrière peuvent être davantage enclins à traiter un TUO. Une étude a montré qu’aux États-Unis environ un tiers des médecins résidents qui ont suivi un programme de formation sur l’usage clinique de la buprénorphine la prescrivent par la suite.

On a constaté que la stigmatisation des soins apportés aux patients présentant des troubles liés à l’usage de substances psychoactives persiste en raison de l’insuffisance de l’enseignement et de la formation. De plus, de nombreux médecins de famille en début de carrière affirment ne pas être prêts à prescrire un traitement par buprénorphine, tandis que certains ne le prescrivent pas du tout, alors qu’il est vital. Aucune étude canadienne ne s’est intéressée à l’incidence de la formation médicale sur l’aptitude des nouveaux médecins résidents en médecine familiale à prescrire un TAO.

Méthode

L’équipe de recherche a effectué une analyse environnementale des programmes d’études en médecine dans plusieurs établissements d’enseignement de l’Université de Toronto et a réalisé des entrevues qualitatives auprès de récents diplômés en médecine familiale.

Dans le cadre de l’analyse environnementale, l’équipe de recherche a envoyé un courrier électronique normalisé aux directeurs des programmes de formation postdoctorale en médecine familiale et aux résidents en chef des 15 établissements d’enseignement de l’Université de Toronto dans lequel il leur était demandé de répondre à des questions sur les stages cliniques obligatoires en prise en charge des dépendances dans leur établissement et de fournir des précisions sur le programme d’études formel lié au TUO, à la buprénorphine et à la méthadone.

Les entrevues ont été menées à l’aide d’un questionnaire semi-structuré et de questions ouvertes portant sur les besoins en matière d’apprentissage perçus par les diplômés en médecine familiale dans le domaine de la santé mentale et des dépendances. L’équipe de recherche a également effectué une analyse thématique des réponses obtenues lors des entrevues.

Conclusions de la recherche

Résultats de l’analyse environnementale

Quatre établissements d’enseignement n’ont pas répondu. Sur les 11 établissements dont les résidents en chef et directeurs des programmes ont répondu aux questions formulées dans le courriel, trois comptaient des stages cliniques obligatoires en prise en charge des dépendances, un offrait un stage de deux semaines au cours de la première année de résidence, un autre proposait quatre demi-journées dans une clinique de traitement des dépendances à accès rapide pendant un stage en psychiatrie et un autre deux demi-journées pendant un stage en santé mentale. Huit établissements ont déclaré ne pas avoir de stages obligatoires sur les troubles liés à l’usage de substances psychoactives.

Quatre établissements ne proposaient aucun cours formel sur la prise en charge des dépendances pendant les demi-journées d’enseignement hebdomadaires, tandis que dans les sept autres établissements environ une à cinq heures par an d’enseignement formel étaient prévues à cet égard.

Souvent, l’enseignement était dispensé par des médecins de famille ayant suivi un programme de formation avancée en médecine de la dépendance et, dans certains cas, par des professeurs de médecine familiale n’ayant pas reçu une formation en compétences avancées. Dans un cas, c’était un médecin urgentiste qui assurait cet enseignement.

Constatations issues des entrevues avec les diplômés

L’équipe de recherche a interviewé quatre femmes et quatre hommes diplômés en médecine familiale (29-31 ans) à l’Université de Toronto.

Parmi les personnes interrogées, trois avaient reçu une formation complémentaire à la fin de leur résidence en médecine familiale, une avait suivi une formation en médecine d’urgence, une autre en prise en charge des dépendances et la troisième n’en a pas révélé le domaine.

L’analyse thématique des entrevues a mis en évidence deux thèmes fondamentaux :

  1. l’environnement éducatif et les programmes de formation en médecine familiale aggravent la marginalisation des personnes présentant un TUO ;
  2. les clients ayant un TUO et le traitement de ce trouble ne sont pas considérés comme étant du ressort de la médecine familiale.

L’équipe de recherche a conclu qu’en ce qui a trait au TUO, les expériences de formation varient considérablement. En conséquence, les diplômés en médecine familiale ne sont pas prêts à soigner des patients présentant un TUO, y compris les traiter par la buprénorphine. Selon elle, il faut mettre en place des stratégies pour normaliser la formation sur le TUO et l’exposition à des situations cliniques dans tous les établissements de l’Université de Toronto.

Portée et limites de l’étude

L’équipe de recherche a relevé plusieurs limites à cette étude qui doivent être prises en compte lors de l’interprétation des résultats. Ainsi, l’étude ne s’étant déroulée que dans une seule université, il est impossible d’en généraliser les conclusions à d’autres programmes postdoctoraux au Canada.

L’équipe de recherche a également souligné que les diplômés ayant participé aux entrevues étaient en petit nombre. Elle a noté qu’elle était malgré tout parvenue dans son étude à appréhender parfaitement les points de vue des participants, aucune autre dimension, nuance ou idée n'ayant pu être trouvée. En outre, les participants à l’étude s’intéressaient peut-être particulièrement aux dépendances, alors que des personnes qui ne portent pas un intérêt spécial à celles-ci auraient probablement donné différents types de réponses.

Applications possibles

Les données fournies par cette étude peuvent servir aux institutions cherchant à normaliser et à remanier le programme postdoctoral de résidence en médecine familiale ainsi qu’à réviser les thèmes prioritaires et les aspects clés liés au TUO.

À propos de l’équipe de recherche

  1. Bassi1, Ramdawar, EA2,3,4,5, Selby, P,2,3,6,7,8 , Stolarski, K6, Wyman, J1,2, Lazare, K2, Bozinoff, N1,2,6
  2. Division d’addictologie, Hôpital Women’s College, Toronto, Ontario, Canada
  3. Département de médecine familiale et communautaire, Université de Toronto, Toronto, Ontario, Canada
  4. École de santé publique Dalla Lana, Université de Toronto, Toronto, Ontario, Canada
  5. Institut de la politique de santé, prise en charge et évaluation, Université de Toronto, Toronto, Ontario, Canada
  6. Centre Wilson, Réseau universitaire de santé et Faculté de médecine Temerty, Toronto, Ontario, Canada
  7. Division des dépendances, Centre de toxicomanie et de santé mentale, Toronto, Ontario, Canada
  8. Institut de recherche en santé mentale de la famille Campbell, Centre de toxicomanie et de santé mentale, Toronto, Ontario, Canada
  9. INTREPID Lab (anciennement Clinique de la dépendance à la nicotine), Centre de toxicomanie et de santé mentale, Toronto, Ontario, Canada

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