En bref
Le trouble de stress post-traumatique (TSPT) est une maladie mentale pouvant apparaître chez des personnes qui ont vécu un événement traumatisant ou en ont été témoins. D’après un récent article publié dans une revue par une équipe de recherche, trois groupes présentent un risque de développer un TSPT lié à la pandémie actuelle de COVID‑19 : a) les survivants d’une forme grave de COVID-19, b) les proches de personnes qui ont survécu à un cas grave de COVID-19 ou ont été emportées par le virus et c) les prestataires de soins de santé de première ligne qui sont témoins de cas de COVID-19 engageant le pronostic vital ou provoquant le décès des patients.
À la lumière de ces données, les prestataires de services de santé mentale devraient se préparer, selon l’équipe de recherche, à une recrudescence du nombre de patients présentant un TSPT, ce en mettant d’abord en place un dépistage systématique de ces symptômes et en étant à même d’effectuer des interventions thérapeutiques fondées sur des données probantes.
Contexte
Une forme grave de COVID-19 peut mettre la vie en danger. L’expérience peut donc être considérée comme traumatisante. Un trouble de stress post‑traumatique (TSPT) peut apparaître chez des personnes qui ont été exposées à un événement traumatisant, y compris celles qui ont été confrontées à la mort ou à la peur de mourir, ont vécu un tel événement traumatisant ou ont appris qu’un proche en avait subi un, ou ont eu connaissance de façon répétée et excessive de détails sur l’événement traumatisant.
L’équipe de recherche en Pologne et au Royaume-Uni s’est donc attachée à répondre à deux questions :
- Qui présente le plus de risque de développer un TSPT lié à la pandémie de COVID-19?
- Comment les spécialistes de la santé mentale peuvent-ils se préparer à prendre en charge les TSPT liés à la pandémie?
Idées avancées par les expert.e.s
Selon l’équipe de recherche, les fournisseurs de services de santé mentale doivent s’attendre à constater une augmentation des taux de fréquence de TSPT dans trois groupes particuliers :
- Les survivants d’une forme grave de COVID-19 : L’équipe de recherche a trouvé de récentes études réalisées en Italie qui montrent que de 10 à 30 p. 100 des survivants d’une forme grave de COVID-19 présentaient des symptômes du TSPT. Par ailleurs, des études plus anciennes menées à la suite de l’épidémie du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) indiquaient que la fréquence du TSPT chez les survivants de la maladie était susceptible d’augmenter avec le temps ; presque 55 p. 100 des personnes ayant contracté le SRAS et ayant dû être hospitalisées développaient un TSPT environ quatre ans après leur sortie de l’hôpital.
- Les proches de personnes qui ont survécu à un cas grave de COVID-19 ou ont été emportées par le virus : Les personnes dont un proche décède subitement et de manière inattendue sont susceptibles de présenter un risque de développer un TSPT et un trouble de deuil prolongé (TDP). Concernant la COVID-19, les émotions suscitées par la mort d’un être cher ou la peur de la mort d’un proche sont exacerbées par les restrictions mises en place pendant la pandémie, dont obligation de se mettre en quarantaine, report des funérailles et limites des admissions de visiteurs dans les hôpitaux et les lieux de commémoration.
- Les prestataires de soins de santé de première ligne qui sont témoins de cas de COVID-19 engageant le pronostic vital et de décès liés au virus : Le personnel des hôpitaux et des foyers de soins de longue durée, qui est témoin du traumatisme que causent une forme grave de COVID-19 et les décès liés à ce virus, craint aussi sans doute d’être infecté et de mourir. Cette peur peut être exacerbée quand le matériel médical est insuffisant ou inadéquat.
L’équipe de recherche estime que, pour se préparer à cette augmentation du nombre de patients présentant des symptômes du TSPT, les prestataires de services de santé mentale doivent :
- faire mieux connaître et comprendre le TSPT et ses symptômes au personnel soignant, aux patients et à leur famille ;
- mettre en place dans les établissements de soins primaires un test de dépistage systématique du TSPT chez les personnes appartenant aux groupes à haut risque mentionnés ci-dessus d’un à six mois après un événement traumatisant (quand un suivi par un spécialiste de la santé mentale est possible) ;
- commencer à dépister un trouble de deuil prolongé (TDP) dans les familles endeuillées 12 mois après la mort d’un être cher causée par la COVID-19 ;
- se préparer à effectuer des interventions thérapeutiques fondées sur des données probantes pour traiter le TSPT, c’est-à-dire :
- intensifier les actions de formation sur les techniques d’intervention thérapeutique efficaces, comme la thérapie d’exposition et la thérapie du processus cognitif,
- adapter les interventions au contexte local actuel (p.ex., interventions en ligne),
- déterminer le soutien psychologique dont ont besoin les enfants quand leurs parents présentent un TSPT ;
- envisager des stratégies de prévention du TSPT et tenir compte d’autres risques qui lui sont associés (p.ex., suicide).
Applications possibles
Dans le domaine de la santé mentale et des soins primaires, le personnel clinique peut s’appuyer sur ces données pour surveiller et améliorer la santé mentale de personnes qui ont survécu à une forme grave de COVID-19 ou y ont été exposées.
Recommandations concernant les recherches à l’avenir
L’équipe de recherche préconise que, dans les mois et les années qui suivront la fin de la pandémie de COVID‑19, on étudie pleinement la prévalence des TSPT liés à la pandémie dans la population.
Auteur.e.s
Marcin Sekowski1, Małgorzata Gambin2, Karolina Hansen2, Paweł Holas2, Sylwia Hyniewska3, Julia Wyszomirska4, Agnieszka Pluta2, Marta Sobańska2 et Emilia Łojek2
- Département de psychologie, Université Maria Grzegorzewska, Varsovie, Pologne
- Faculté de psychologie, Université de Varsovie, Varsovie, Pologne
- Département de psychologie expérimentale, University College de Londres, Londres, Royaume‑Uni
- Département de psychologie, Université médicale de Silésie, Katowice, Pologne