En bref
Alors que le public s’intéresse davantage à la possibilité d’utiliser des substances psychédéliques pour le traitement de maladies mentales et de dépendances, il est de plus en plus important que les prestataires de services s’informent sur la façon d’appuyer les clients qui souhaitent utiliser des substances psychédéliques à cette fin. Dans cet article évalué par un comité de lecture, les chercheurs soulignent la promesse d’une réduction des méfaits et d’une thérapie d’intégration (RMTI) et abordent les questions juridiques et éthiques ainsi que des moyens de diminuer les risques tant pour les clients que pour les cliniciens qui amorcent un dialogue sur le recours aux substances psychédéliques.
Contexte
Dans le cadre d’essais cliniques, on démontre de plus en plus les bienfaits thérapeutiques de substances psychédéliques pour les personnes ayant des problèmes de santé mentale ou de dépendance. Ces substances comprennent le diéthylamide de l’acide lysergique (LSD), la mescaline, la diméthyltryptamine (DMT) et la psilocybine. Par conséquent, un nombre accru de personnes souhaitent avoir recours à une thérapie psychédélique, ce qui fait qu’il est davantage important que les prestataires de services se renseignent sur les substances psychédéliques. Dans la plupart des territoires de compétence, les substances psychédéliques demeurent des substances contrôlées. Par conséquent, les prestataires de services doivent tenir compte d’un certain nombre de facteurs juridiques et éthiques alors qu’ils appuient leurs clients désireux de recevoir une thérapie psychédélique.
Quels concepts les chercheurs présentent-ils?
Les chercheurs préconisent que les cliniciens utilisent une approche de réduction des méfaits pour appuyer les clients qui souhaitent avoir recours à des substances psychédéliques. La réduction des méfaits peut être associée à la santé publique ou à un mouvement de justice sociale, mais c’est aussi une méthode qui a été intégrée dans la psychothérapie pour les personnes qui adoptent divers comportements dangereux.
Dans les essais cliniques, le soutien psychothérapeutique pour les personnes qui reçoivent un traitement psychédélique comporte habituellement des séances de préparation, la prestation de soutien au cours des séances d’administration de doses et quelques séances de suivi ou d’« intégration » après chacune des séances d’administration de doses pour discuter de l’expérience, et ce, dans un milieu contrôlé. Dans le cadre d’une approche de réduction des méfaits, le soutien psychothérapeutique commencerait par la prestation de ressources ou par la sensibilisation des clients aux risques et aux bienfaits des substances psychédéliques et aux solutions de rechange, pour les aider à faire un choix éclairé concernant l’utilisation de ces substances sans être jugés. Si un.e client.e opte pour un traitement psychédélique, le clinicien peut alors concentrer ses efforts pour l’aider à planifier une utilisation sécuritaire de la substance psychédélique de son choix et à en tirer profit au maximum. Il ne s’agirait pas pour le.la clinicien.ne d’assister aux séances d’administration de doses ou de les mener, mais il devrait pratiquer le même type d’intégration à la suite de l’utilisation de la substance que lors des essais cliniques.
Bien entendu, les types et le niveau des risques associés à la participation du.de la clinicien.ne dans la réduction des méfaits psychédéliques et la thérapie d’intégration (RMTI) dépendent des lois locales et de leur mise en application ainsi que des organismes de délivrance du permis d’exercer concernés. Les risques peuvent prendre la forme d’une atteinte à la réputation, d’une perte du permis d’exercer et d’une poursuite au civil, voire au criminel.
Pour diminuer ces risques, les chercheurs font les recommandations suivantes aux cliniciens :
- éviter de faciliter l’accès à des drogues illégales en fournissant un lieu physique où elles peuvent être consommées ou en coordonnant une rencontre avec des « guides » psychédéliques clandestins;
- expliquer clairement aux clients les limites de leur pratique clinique;
- chercher à obtenir une formation et une supervision dans le domaine de la RMTI et consulter d’autres personnes qui font ce travail;
- examiner les lois locales, les exigences associées au permis d’exercer et les attitudes à l’égard des substances psychédéliques (en gardant à l’esprit que les cliniciens et les clients qui ont plus de pouvoir et de privilèges risquent moins de faire l’objet de stigmatisation et de poursuites);
- se familiariser avec les données de recherche concernant l’utilisation de substances psychédéliques pour le traitement des maladies mentales et/ou des dépendances (en gardant à l’esprit le manque de diversité chez les sujets des études de recherche et les connaissances des groupes autochtones qui utilisent de telles substances à des fins médicinales ou religieuses depuis de nombreuses générations, bien avant l’invention de la psychothérapie);
- réfléchir à leurs objectifs liés à leur pratique clinique, à leur niveau de compétence et de privilèges et au niveau de risque qu’ils se sentent à l’aise d’accepter.
Applications possibles
Cette information peut être utilisée par les thérapeutes qui travaillent avec des clients à la recherche d’expériences psychédéliques à des fins personnelles ou thérapeutiques.
Quelle recherche future est recommandée?
Les chercheurs recommandent d’intensifier les efforts pour élaborer à l’intention des thérapeutes qui s’intéressent à la RMTI des lignes directrices éthiques et professionnelles, notamment un code déontologique.
Auteur.e.s
Brian Pilecki 1, Jason B. Luoma1, Geoff J. Bathje 2, Joseph Rhea3, Vilmarie Fraguada Narloch4
- Portland Psychotherapy Clinic, Research & Training Center, Portland (Oregon), États-Unis
- Department of Counseling and Integrated Programs, Adler University, Chicago (Illinois), États-Unis
- Avocat, Palm Springs (Californie), États-Unis
- Students for Sensible Drug Policy, Washington (D.C.), États-Unis