En bref
La sexualité des personnes ayant un trouble du spectre de l’autisme (TSA) est un sujet d’intérêt croissant, mais la recherche révèle un manque d’éducation sexuelle adaptée à leurs besoins. L’étude présentée ici a été menée afin d’évaluer l’efficacité de programmes portant sur le développement sexuel des jeunes ayant un TSA et d’identifier les pratiques favorables ainsi que les besoins de cette population en matière de développement sexuel. La méta-analyse a retenu cinq études mesurant l’efficacité de deux programmes : TTT (Tackling Teenage Training) et HR (Healthy Relationship & Autism). Globalement, les participants aux deux programmes possèdent davantage de connaissances liées à la sexualité. Les auteurs sont d’avis qu’il faut mener davantage de recherches sur les programmes existants afin de mieux comprendre les pratiques qui répondent aux besoins des jeunes ayant un TSA et les facteurs qui influencent l’efficacité de ces interventions.
Objet de la recherche
Le trouble du spectre de l’autisme (TSA) est un trouble neurodéveloppemental caractérisé par des déficits dans les domaines de la communication et des interactions sociales, ainsi que par des comportements ou intérêts restreints et répétitifs. La sexualité des personnes ayant un TSA est un sujet d’intérêt croissant à mesure qu’augmente le nombre d’adolescents diagnostiqués. Les études rapportent un manque d’éducation sexuelle formelle adaptée aux besoins d’apprentissage des adolescents atteints d’un TSA, malgré le fait que ces derniers expriment le besoin et le désir de former des relations affectives.
Bien qu’il existe des pratiques prometteuses pour cette population, plusieurs questions subsistent sur l’efficacité des programmes existants. Les chercheurs ont donc conduit une méta-analyse des études primaires afin d’évaluer l’efficacité d’interventions portant sur le développement sexuel de personnes ayant un TSA de niveau 1 et 2. Les chercheurs avaient également pour but d’en apprendre davantage sur les pratiques favorables et les besoins de cette population en matière de développement sexuel.
Méthodes
Les chercheurs ont effectué une méta-analyse des études primaires sur l’efficacité d’interventions portant sur le développement sexuel de personnes ayant un TSA de niveau 1 et 2, c’est‑à‑dire celles capables d’avoir des interactions sociales et de communiquer de manière satisfaisante, avec un certain soutien. Les chercheurs ont concentré leur analyse sur les jeunes âgés de 16 à 25 ans.
Conclusions de la recherche
La méta-analyse a permis d’identifier cinq études primaires dont l’objectif était d’évaluer un programme ou une intervention visant à soutenir le développement de multiples compétences relationnelles en prévision de la transition à l’adolescence et à la vie adulte.
Deux programmes sont ressortis de ces études :
- le programme TTT (« Tackling Teenage Training ») est dispensé individuellement et offre une psychoéducation et une mise en pratique des compétences en communication sur les sujets liés à la puberté, à la sexualité et aux relations intimes;
- le programme HR (« Healthy Relationship & Autism Program») se fonde sur un enseignement théorique en groupe qui vise à faciliter les relations interpersonnelles saines.
Selon les cinq études recensées par la méta‑analyse, les programmes d’intervention portant sur le développement des connaissances psychosexuelles des jeunes ayant un TSA sont très efficaces. Cela veut dire que de façon globale, les participants ayant suivi l’un des deux programmes ont davantage de connaissances liées à la sexualité. Les chercheurs n’ont observé aucun lien entre l’âge des participants et l’efficacité des interventions.
Les auteurs ont également relevé les besoins propres aux personnes ayant un TSA, et les pratiques qui favorisent le développement et l’expression harmonieuse de la sexualité chez les jeunes ayant un TSA. Parmi les pratiques favorables, les auteurs citent l’enseignement théorique et pratique portant sur le comportement sexuel, l’autonomie sexuelle, l’hygiène de base et le développement relationnel, l’animation du programme par un formateur ou une formatrice certifié.e, et l’appui des parents, qui contribuent à la généralisation des apprentissages en donnant à leurs enfants adolescents des devoirs à la maison.
Portée et limites de l’étude
L’équipe de recherche a identifié plusieurs limites des résultats de la méta-analyse :
- le nombre restreint d’études de qualité recensées;
- le nombre limité d’études qui incluaient les caractéristiques individuelles de leurs participants;
- le nombre limité d’études ayant un groupe contrôle;
- le peu de recherche sur l’efficacité d’autres programmes répertoriés;
- l’absence d’instruments validés d’évaluation des connaissances en matière de sexualité chez les personnes atteintes d’un TSA;
- le manque de connaissances sur l’effet de certaines caractéristiques des participants ou des programmes sur l’efficacité de ces derniers.
Applications possibles
Les auteurs soulignent qu’il faut mener davantage de recherches sur l’efficacité des programmes existants afin de mieux comprendre les pratiques qui répondent aux besoins des jeunes ayant un TSA et les facteurs pouvant affecter l’efficacité de ces interventions. De plus, les auteurs sont d’avis qu’il faut surveiller l’évolution des acquis en matière de connaissances psychosexuelles et leur impact sur le développement et l’expression de la sexualité chez les jeunes ayant un TSA. De telles recherches permettraient d’identifier des lignes directrices pour élaborer des ressources d’éducation sexuelle qui soient adaptées aux besoins des adolescents présentant un TSA et fondées sur des données probantes.
Auteurs.trices
Kevin Dubé1, Eve-Line Bussières1, Marie-Hélène Poulin2
1 Département de psychologie, Université du Québec à Trois-Rivières
2 Département de psychoéducation, Université du Québec en Abitibi-Témiscamingue