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Recherche en bref : Les émotions négatives associées au changement climatique sont liées à l’insomnie et aux problèmes de santé mentale

En bref

On s'attend à ce que la crise climatique ait des répercussions négatives sur la santé mentale de la population mondiale à mesure que la prise de conscience du changement climatique, les conditions météorologiques extrêmes et les événements climatiques de grande envergure prennent de l’ampleur. Les chercheurs de cette étude se sont basés sur des échantillons de la population de 25 pays et sur un échantillon norvégien représentatif sur le plan national pour examiner l’incidence des émotions négatives associées au changement climatique (telles que la détresse psychologique, l'anxiété et l'inquiétude) sur le sommeil et la santé mentale. Selon leurs constatations, les émotions négatives associées au changement climatique sont liées à des symptômes d'insomnie et à une moins bonne santé mentale autoévaluée. Toujours selon leurs constatations, il est nécessaire de mener des recherches interdisciplinaires pour comprendre comment les réponses émotionnelles négatives au changement climatique nuisent à la santé mentale d'une manière particulière.

Objet de la recherche

L’anxiété climatique, également connue sous le nom d’« écoanxiété », est une peur chronique des catastrophes écologiques. Elle devient plus courante, du fait que les gens sont de plus en plus exposés aux réalités du changement climatique.

Selon les chercheurs, on assistera à une hausse des émotions négatives associées au changement climatique. Vu la couverture médiatique et la sensibilisation du public, on s’attend même à observer ce phénomène chez les personnes qui ne sont pas directement exposées aux événements climatiques.

Même si l’anxiété climatique n’est pas classée comme étant un trouble mental, les chercheurs estiment que les réponses émotionnelles négatives aux problèmes environnementaux peuvent nuire considérablement à la santé et au fonctionnement psychologique. Ils s’attendent également à ce que de telles émotions négatives causent des problèmes de sommeil, qui, à eux seuls, constituent une cause courante et un symptôme fréquent de divers troubles mentaux.

Les chercheurs ont mené cette étude pour éclaircir le lien qui existe entre les émotions négatives associées au changement climatique, la santé mentale et le sommeil dans plusieurs pays.

Méthodes

Les chercheurs ont mené deux importantes enquêtes transversales : 

  1. À l’automne 2019, ils ont recruté, dans un bassin de participants à la recherche universitaire, un échantillon diversifié de résidents de 25 pays représentant tous les continents habités, à l’aide d’une méthode d’échantillonnage de commodité. Dans les pays non anglophones, le questionnaire a été traduit dans la langue locale et retraduit vers l’anglais par des personnes bilingues.
  2. Au printemps 2020, ils ont recruté un échantillon représentatif de résidents de la Norvège par l’entremise d’un panel de recherche commercial.

Les items de l’enquête ont permis aux chercheurs de mesurer les émotions négatives associées au changement climatique, les symptômes d’insomnie et la santé mentale autoévaluée.

Les chercheurs ont utilisé un indice à sept items fondés sur l’élément « état d’anxiété » du questionnaire sur l’anxiété chronique et réactionnelle State-Trait Anxiety Inventory. Les participants ont quant à eux utilisé une échelle à cinq points pour évaluer leurs sentiments à l’égard du changement climatique lorsqu’ils remplissaient le questionnaire (p. ex., calme, tendu, détendu, anxieux, paisible, inquiet et terrifié).

Les chercheurs ont mesuré les symptômes d’insomnie à l’aide de la Bergen Insomnia Scale, qui comporte des questions telles que les suivantes :

Les chercheurs ont mesuré la santé mentale autoévaluée à l’aide d’une échelle à un seul item tirée du supplément sur la santé mentale de l’Enquête sur la santé en Ontario. Ils ont demandé aux participants d’évaluer leur état général de santé mentale sur une échelle à cinq points.  

Pour comparer les pays occidentaux aux autres pays, les chercheurs ont utilisé la classification suivante :

Conclusions de la recherche

Dans la plupart des pays, les chercheurs ont observé un lien entre les émotions négatives associées au changement climatique et la présence de symptômes d’insomnie (dans 72 % des pays). Ils ont également observé un lien entre les émotions négatives associées au changement climatique et une moins bonne santé mentale autoévaluée (dans 84 % des pays). Cela laisse entendre que les émotions négatives associées au changement climatique influent sur la santé mentale à l’échelle mondiale et qu’elles sont liées à des problèmes de sommeil, alors que le sommeil constitue un élément nécessaire au bon fonctionnement psychologique et au bien‑être.  

Les participants d’un même pays étaient plus susceptibles de présenter des symptômes d’insomnie et des scores de santé mentale autoévaluée semblables que les participants issus de pays différents. Le lien entre les émotions négatives associées au changement climatique et les symptômes d’insomnie était semblable dans les pays occidentaux et dans les autres pays.

Cependant, le lien entre les émotions négatives associées au changement climatique et les scores inférieurs de santé mentale autoévaluée était légèrement plus fort dans les pays occidentaux que dans les autres pays.

Les femmes présentaient davantage de symptômes d’insomnie et de pires scores de santé mentale. Par contre, les répondants plus âgés jouissaient d’une meilleure santé mentale.  

Cette étude est la première à examiner la relation qui existe entre les émotions liées au changement climatique et à la santé mentale à partir de données transnationales portant sur divers antécédents culturels. Les constatations viennent renforcer le consensus selon lequel le changement climatique influe sur la santé mentale, non seulement par exposition directe, mais aussi par le biais des facteurs de stress psychologiques qui découlent de la sensibilisation à la menace actuelle et future.  

Applications possibles

La définition de la santé mentale est subjective et varie d’un groupe culturel à l’autre. Les chercheurs laissent entendre que l’on devrait considérer les troubles du sommeil ou les symptômes d’insomnie comme un indice de diagnostic transculturel viable et non équivoque pour l’évaluation de l’incidence des réponses émotionnelles négatives au changement climatique sur la santé mentale.  

Il est nécessaire de pousser la recherche pour établir comment et dans quelle mesure les réponses émotionnelles négatives au changement climatique nuisent à la santé mentale de la population sur diverses échelles culturelles et géographiques.

Des études expérimentales et longitudinales s’imposent pour élucider l’orientation de cette relation. S’imposent également de façon continue des études interdisciplinaires et transculturelles sur le fardeau de la maladie unique attribuable aux émotions négatives associées au changement climatique.  

Auteurs

Charles Adedayo Ogunbode1,2, Ståle Pallesen3, Gisela Böhm3,4 et coll.

  1. École de psychologie, Université de Nottingham, University Park Campus, psychologie, Nottingham NG7 2RD, Royaume-Uni
  2. École de sciences sociales appliquées, Université De Montfort, immeuble Hawthorn, The Gateway, Leicester LE1 9BH, Royaume-Uni
  3. Département des sciences psychosociales, Faculté de psychologie, Université de Bergen, Bergen, Norvège
  4. Département de psychologie, Université des sciences appliquées de la Norvège intérieure, Lillehammer, Norvège

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